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Dans le cadre d’un projet du groupe REZO au laboratoire de recherche AIHP-GEODE EA 929, je m’intéresse à reconstituer le parcours de certaines familles travaillant dans la commune de Trinité au début du XXe siècle à partir d’une liste d’employés. Les registres matricules du recrutement militaire sont dans ce cas une bonne piste pour retrouver rapidement une date et un lieu de naissance pour des hommes nés en Martinique entre 1869 et 1901*.
En effet, à partir de 1889, le principe (et non son application effective) de la conscription et du service militaire obligatoire fut étendu aux Antilles ; aussi une fiche individuelle était dressée pour chaque classe d’hommes âgés de 20 ans, à l’exclusion néanmoins des étrangers. Pour chacun, on trouve renseigné : le nom, la filiation, la date et le lieu de naissance, le lieu de résidence, le métier ou l’activité, une description physique et bien entendu les états des services (affectations, congés, distinctions…).
Ces informations ne sont évidemment pas toujours intégralement remplies, loin de là, alors vous pouvez imaginer ma surprise et mon enthousiasme débordant quand je suis tombée sur une fiche avec une photographie! Aujourd’hui, nous découvrons donc Germain Hilaire CAPITAINE, matricule 0565, classe 1919, et tout ce que nous pouvons apprendre d’un dossier militaire quand on fait sa généalogie.
Éléments d’identité sur Germain Hilaire Capitaine
Germain Hilaire Capitaine est né et décédé au Robert (le 4 juillet 1899 – 9 août 1951). Fils de Marie Damien Capitaine, il était tonnelier de profession. Il est décrit comme ayant les cheveux noirs, les yeux marron, le front bombé, le visage rond, la bouche ronde, les lèvres épaisses, le teint noir. Il mesure 1m64 et possède un point creux sur la joue droite comme en témoigne le portrait photographique.
Les informations de la fiche fournissent des indications qui peuvent aider à reconstruire une généalogie. Ici, à partir de la date et du lieu de naissance, il est théoriquement possible de reconstituer l’arbre du côté maternel de Germain en allant rechercher l’acte de naissance du jeune homme.
En l’absence habituelle de photographie, la description physique permet de s’imaginer quelque peu l’allure physique générale de l’individu décrit. Pour la moderniste que je suis, spécialiste du XVIIIe siècle, les possibilités de connaître l’apparence des gens sont très rares, surtout pour les populations les plus modestes ; je ne possède pas non plus de vieux portraits de ma famille antillaise. J’ai donc toujours un plaisir vif, quand j’en croise dans les sources des XIXe et XXe siècles, à des périodes où ces portraits ne sont pas facilement à la portée de toutes les bourses.
État des services de Germain Hilaire Capitaine
Mais la fiche offre plus que des renseignements d’identité. Elle est aussi intéressante pour en apprendre davantage sur ceux qui comme Germain ont été mobilisés pendant la guerre. Certains sont réformés pour cause d’insuffisance physique ; d’autres sont signalés déserteurs. Enfin, reste ceux qui intègrent les rangs. Le détail des services de Germain indique :
« Incorporé au bataillon d’infanterie colonial de la Martinique à compter du 22 juin 1918, arrivé au corps et 2e classe le dit jour, passé à la Compagnie de la Guyane le 6 février 1919 arrivé au corps le 12 février 1919. Embarqué à destination de France sur le paquebot « Haïti » le 18 mai 1920, passé le dit jour au 157e Régiment d’artillerie à pied et arrivé au corps le 14 juin 1920. Placé le dit jour dans la disponibilité (?). Rapatrié par Paquebot « Haïti » le 3 février 1921 en attendant son passage dans la R.A.A. Se retire au Robert, passé dans la R.A.A. le 15 avril 1921. Affecté dans la réserve de la Cie d’Infanterie de la Martinique. »
Je ne reviendrai pas en détail sur le parcours militaire de Germain, car je n’exclus pas de faire aussi un billet touchant plus spécifiquement à la Première Guerre mondiale. Mais on le voit, à tout juste 19 ans, Germain est incorporé alors que les combats font toujours rage et que la situation de la France est incertaine.
Et vous, avez-vous déjà rencontré des photos dans les registres matricules de Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion… ? Si c’est le cas, je vous invite à partager un lien vers la fiche et sa photo en commentaire pour que nous puissions nous aussi en profiter.
Mise à jour du 21 février 2018 : J’ai reçu un message cette semaine de Charlotte V. (merci beaucoup à vous) qui me signale qu’on trouve des photos dans les registres des classes 1919, parfois même avec des empreintes digitales ; elle a partagé par exemple ce lien pour la Guadeloupe avec des photos en bon état. J’ai donc feuilleté rapidement un registre pour la Martinique et j’ai en effet trouvé des fiches comme celle de Jubert avec photo et empreintes! Je vous invite donc à consulter les registres militaires de 1919 si vous voulez voir quelques photos.
(*) les modalités d’accès permettent de consulter librement les dossiers antérieurs à 1922.
Source – Dossiers militaires 1R1
Comme les Archives territoriales de la Martinique, les Archives départementales de Guadeloupe ont mis en ligne leurs registres matricules, malheureusement aucune base de données ne vient soutenir la numérisation, il n’est donc pas possible d’obtenir des résultats à une requête portant sur les noms des Guadeloupéens. C’est plus fastidieux, mais il est toutefois possible de s’aider des tables alphabétiques. Avec respectivement plus de 5000 et 44 000 entrées, les registres matricules de la Guyane et ceux de La Réunion sont quant à eux aisément consultables sur le site des ANOM.
Tout savoir des registres-matricules à la Martinique.
Tout savoir des registres-matricules conservés aux ANOM.
Voir la fiche complète de Germain Hilaire CAPITAINE, matricule 0565, classe 1919, conservée aux Archives territoriales de la Martinique.
Incroyable ! Je n’ai pas eu cette chance dans les registres matricules de la Réunion que j’ai consultés. On peut se demander si une photo était prise au recrutement (pourquoi de profil?) ou si c’est la recrue qui a apporté la photo.
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J’ai reçu ce matin un message avec d’autres photos pour un registre de Guadeloupe! Elles sont de profil ; on peut donc supposer que c’était le format attendu. Je vais éditer l’article pour faire une petite note, parce qu’il s’avère que les photos sont sur des registres de 1919, tout comme la mienne… Si vous voulez en voir sur la Réunion, c’est la classe à privilégier. Voici un lien vers le registre de la Guadeloupe, il y en a plusieurs à feuilleter le long du registre. http://www.archivesguadeloupe.fr/archives-en-ligne/img-viewer/militaires/1R108/iipviewer.html?np=FRAD971_1R108_001_C.jpg&nd=FRAD971_1R108_665_C.jpg&ns=FRAD971_1R108_239_C.jpg
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C’est une bonne question et pour l’instant je n’ai aucune réponse! Peut-être, dans ce cas précis, le profil a été préféré car on y voit la marque distinctive sur la joue.
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